SOUVENIRS DE JADE
INTERVIEW D'YSABEL ROUSSEAU
Interview accordée à Isabelle B. Price le 11 Février 2013 pour le site Univers-L.com.
Est-ce que vous pouvez vous présenter à nos lectrices et nous expliquer votre parcours ?
Je suis née dans une ville ouvrière de
Saône-et-Loire, Le Creusot, Bourgogne. Mon enfance a été partagée entre
Le Creusot et la ruralité d'une petite commune du Morvan, Anost.
Très tôt je me passionne pour le théâtre et
deviens vite fan de grandes artistes comme Jacqueline Maillan,
Micheline Dax, Marthe Mercadier dont j'admire l'aisance sur les
planches et le talent. Durant mon année de BTS, j'écris ma première
pièce de théâtre Jamais deux sans trois qui fait l'ouverture du
festival de théâtre amateur du Creusot en juin 1997 et sera rejouée à 9
reprises à Orléans quelques années plus tard.
Je monte à Paris en 2000 et en décembre 2005, je débute l'écriture de mon premier roman Souvenirs de Jade publié en juin 2012.
Je suis, entre autres, passionnée par les
Etats-Unis, l'anglais, la lecture et l'écriture. Parmi mes auteurs
préférés, se trouvent Alexandre Dumas père, Ken Follett, Sarah Waters,
Romain Sardou, Patricia Cornwell, Yasmina Khadra, Dan Brown...
Je vis aujourd'hui en banlieue parisienne. Je
n'ai pas d'enfant mais un lapin ! Et je ne me cache pas de vivre
l'amour au féminin.
Vous pouvez suivre mon actualité sur mon site "L'arc-en-ciel d'Ysabel" à l'adresse : www.ysabel-rousseau.com
Souvenirs de Jade
est votre premier roman. Pouvez-vous nous dire comment vous est venue
l'envie de devenir auteure ? Qu'aimez-vous dans l'écriture ?
À vrai dire, j’ai très tôt imaginé des
histoires. Plus jeune, j’étais plus souvent dans les nuages que sur
Terre. J’aimais créer des personnages imaginaires à qui il arrivait des
aventures. Je n’avais aucun problème pour m’amuser toute seule. Au
collège, mon prof de français nous a présenté Molière et je suis tout
de suite tombée amoureuse de son théâtre. Dès lors l’envie d’écrire
aussi du théâtre est née en moi, pour ne plus jamais me quitter. Ce que
j’ai fait concrètement quelques années plus tard.
Concernant l’écriture d’un roman, l’envie
m’est venue peu après mon arrivée sur Paris. J’avais envie de raconter
une histoire ciselée et plus longue que ce que l’on peut faire sur une
scène de théâtre. J’avais vécu une histoire d’amour très forte en
émotion et lorsque cette dernière a pris fin, j’ai connu ce que l’on
appelle un vrai chagrin d’amour dont j’ai mis plusieurs années à me
remettre. J’avais dû faire mon deuil dans un parfait silence puisque ma
famille et mes amis ne savaient rien de mon homosexualité à l’époque.
Ce fut une période très dure à vivre. De là est née la ligne rouge de Souvenirs de Jade.
L’écriture me procure un vrai plaisir. Elle
me permet de m’évader et me fait me sentir bien. Je suis toujours en
meilleure forme lorsque j’ai le temps d’écrire.
Vous n'avez pas choisi la facilité en
faisant d'Axelle une femme blessée qui se sent coupable de la mort de
son amante. Pourquoi avoir choisi de parler du deuil en préambule de
l'histoire d'amour ?
Comme je vous le disais, « Souvenirs de
Jade » est né de ma propre expérience. La perte de l’être aimé qu’elle
soit physique ou non, reste un deuil. Une forme moins
définitive certes, mais un deuil tout de même. Je ne voulais pas écrire
un roman autobiographique car je ne pense pas avoir une vie assez
extraordinaire pour la raconter, mais je voulais parler de ce
déchirement que l’on ressent lorsqu’une histoire d’amour très intense
se termine. La notion de culpabilité est un aspect très intéressant de
la vie en général. Elle n’est jamais vécue de la même manière selon les
situations et les individus. Avoir choisi le deuil en préambule,
surtout pour un premier roman, peut s’avérer un pari risqué mais c’est
aussi une manière très forte de se présenter aux lecteurs. « Souvenirs
de Jade » n’est pas un roman mortifère, au contraire !
Comment est née l'histoire de Souvenirs de Jade ? Combien de temps a-t-il fallu pour passer de l'idée au roman enfin publié ?
Partant de ma propre expérience, j’ai
construit mon roman comme on visionne un film. C’est d’ailleurs ma
manière de mettre en place mes histoires. Il m’a fallu sept ans pour
parvenir à la publication de ce roman. Environ six ans d’écriture (avec
des périodes « blanches ») et un an pour trouver un éditeur et
préparer la sortie du livre. Le processus de publication est un vrai
parcours du combattant, surtout lorsque l’on présente son premier roman
sans être « connu ». Je peux vous dire que ce processus est plus long
et douloureux que l’écriture elle-même. Même si écrire demande un
véritable investissement de temps et d’émotions…
Souvenirs de Jade c'est un peu l'histoire d'une seconde chance, non ? Vous pensez qu'on peut aimer aussi fortement plusieurs fois dans sa vie ?
Chaque histoire d’amour est différente. Les
années nous forgent et l’on appréhende les choses différemment à 20 ou
30 ans. Je suis sûre que chacune d’entre nous, ne peut s’empêcher de
comparer une histoire présente à une histoire passée. Il est vrai que
l’on n’aime pas de la même façon à chaque fois. Mais je pense que si
les histoires se vivent différemment, c’est parce que l’on est
nous-mêmes différentes à chaque fois. On apprend à chaque fois, sur
l’amour et sur nous-mêmes. On essaye de tirer des leçons de nos
histoires. Reste à savoir si l’on est capable de ne pas commettre sans
cesse les mêmes erreurs…
Oui, je crois que l’on peut aimer aussi
fortement plusieurs fois. Différemment, mais tout aussi fortement.
J’aime à le penser en tout cas, sans quoi la notion d’espoir n’a plus
lieu d’être. Et lorsque l’on est « fleur bleue » comme je le suis,
l’espoir est souvent tout ce qu’il nous reste face aux déconvenues…
Les Editions Amalthée sont une maison
d'édition généraliste. N'avez-vous pas craint de ne pas être publiée
au vu de l'histoire d'amour homosexuelle ?
J’avoue que je n’ai pas voulu y penser.
J’écris avant tout avec mon cœur et je ne voulais pas mentir pour
entrer dans le monde de l’écriture. J’ai pris le risque et cela a été
positif. Par ailleurs, je pense qu’il faut forcer les portes des
éditions généralistes et ne pas forcément rester dans « le milieu »
afin de faire connaître nos histoires au plus grand nombre. Nous ne
sommes pas des auteures ou des gens à part. Nous faisons partie de
cette société autant que ceux qui écrivent des romans « hétéros ». Il
est important de faire le premier pas, sans quoi personne ne viendra
nous chercher.
Par curiosité, comment définissez-vous Léanne qui a été mariée avec un homme et qui tombe amoureuse d'une femme ?
Une femme intelligente !!! (Rires)
Léanne est une femme à l’écoute de ses
propres émotions. Elle n’a pas peur de ce qu’elle peut ressentir. Elle
est à la fois curieuse (laquelle de nous ne l’est pas ?) et à l’aise
avec sa sexualité. Il faut dire qu’Axelle est géniale non ?! (Rires)
De quoi êtes-vous actuellement la plus fière ?
Lorsque mes lecteurs (ce sont majoritairement
des femmes, mais quelques hommes m’ont envoyé leurs avis) me disent
qu’ils ont passé un bon moment. Certaines femmes m’ont dit que la
lecture de mon roman leur avait donné tant d’émotions par moment,
qu’elles avaient dû faire une pause. Elles se sont retrouvées dans mes
personnages ou dans les situations que vivent ces derniers. Créer LES
émotions, c’est ça qui me fait le plus plaisir.
Avez-vous un autre livre en préparation ?
Oui mon second roman est en ce moment en
cours d’écriture. Il traitera de la recherche des origines. Ma lectrice
officielle (elle ne fait pas partie de notre paroisse…) qui se
reconnaîtra, apprécie déjà ce qui est écrit. Nous nous connaissons
depuis plus de 25 ans et je sais qu’elle ne me passe pas de pommade. Si
c’est bon elle me le dit, si c’est moyen, elle me le dit aussi. C’est
une partenaire d’écriture à part entière. Je peux d’ores et déjà vous
dire que celui-ci ne sera pas estampillé « roman lesbien » mais que les
copines se rassurent, il n’y aura pas que des hétéros !...
Sinon, en ce début d'année 2013, que peut-on vous souhaiter pour l'avenir ?
Un succès pour Souvenirs de Jade
et la publication de mon nouveau roman. Et pour vous, je vais laisser
échapper un scoop (Rires), il s’appelle «De père inconnu »… Et aussi
l’amour ! Ça ne mange pas de pain après tout !!! (Rires)
Merci à vous de tout cœur.
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